Souvenirs rêvés
« Et comme on fait briller ses chaussures,il faut frotter un peu ses souvenirs.
Leur brillance revient à coup sûr. L’enfance est un morceau de cuir« .
Thomasi « L’enfance ».
Retour sur l’irrémédiable
Les regards, les gestes, les émotions ne meurent pas, ils traversent le temps comme autant de traces tangibles d’existences, d’amour, de tendresse, de rivalités et de déceptions sans fin, même si au moment où la scène a été prise, elle contenait sa propre fin.
Jean-Robert Franco saisit, par arrêt sur image, ces instants où quelque chose des protagonistes se lit, souvent même à leur insu. Il travers le temps, remet en scène des personnages en les redisposant dans des situations qu’il photographie, quarante ans plus tard. Des scènes distribuées en série qui racontent une histoire, celle qui a été, celle qui est advenue, celle qui aurait pu être.
C’est entre fiction et réalité que se situe la démarche de Jean-Robert Franco. C’est à partir de films tournés par son père, dans les années cinquante, où à partir de ses propres photographies actuelles qu’il recompose le passé, le sien, celui de ses proches, celui des autres, en le capturant dans de nouvelles images, en le redéfinissant dans une nouvelle figuration, un nouveau montage.
Dans la série « Le départ », Jean-Robert Franco réinvente un passé qui fut réel. C’est lui, aujourd’hui, qui se photographie enfant ; c’est lui qui fait rejouer à ces parents cette scène, c’est lui qui refixe dans une nouvelle distribution. Les œuvres de Jean-Robert Franco nous indiquent le travail de la mémoire, le partage du vrai et du faux, du visible et de l’invisible. De quoi sommes-nous comptables en ce qui concerne ce qui n’est plus, notre enfance, nos parents ? Il semble que ce soit cette question qui guide le travail plastique de Jean-Robert Franco. Et c’est par la recherche de l’intrigue, de l’énigme qui scelle ceux qui ont été proches, qu’il tente d’y répondre.
Martine Vantses
Philippe de Vita à propos de « Ce n’est pas » (Marylin) de Jean-Robert Franco.
>> PDF à télécharger : Ce n’est pas